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Un nouveau rapport dénonce les violations des droits économiques, sociaux et culturels au Vietnam

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GENEVE, 11 novembre 2014 (VCHR) – Le Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme et la FIDH ont présenté aujourd’hui aux Nations Unies leur nouveau rapport, sur les graves violations des droits économiques, sociaux et culturels au Vietnam.

Ce rapport de 36 pages, intitulé « Violations des droits économiques, sociaux et culturels au Vietnam » (disponible en anglais et en vietnamien), a été présenté à l’occasion de la 53ème session du Comité des droits économiques, sociaux et culturels de l’ONU (CESCR) qui se réunit actuellement à Genève (10-28 novembre 2014) afin d’examiner la mise en œuvre du Pacte international relatifs aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC). Le Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme et la FIDH ont préparé ce rapport alternatif pour apporter aux experts de l’ONU des preuves et des analyses sur les graves violations de ces droits se produisant actuellement au Vietnam.

Vo Van Ai témoignant devant le CESCR
Vo Van Ai témoignant devant le CESCR

Le gouvernement vietnamien a envoyé une délégation de 19 personnes emmené par le Vice-Ministre du Plan et de l’Investissement Nguyen Chi Dung pour présenter, le lundi 10 novembre 2014, son rapport périodique. Les 18 experts du CESCR ont écouté le Président du VCHR Vo Van Ai, sa Vice-Présidente Penelope Faulkner ainsi que d’autres représentants de la société civile, avant d’interroger la délégation vietnamienne. La session s’est conclue mardi après-midi. Le CESCR doit présenter ses conclusions et recommandations le 1er décembre 2014.

Bien que le Vietnam soit Partie au PIDESC depuis 1982 et qu’il doive, à cet égard, produire des rapports réguliers sur sa mise en œuvre, son rapport était attendu depuis 1993. « Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels est un des piliers de la protection international des droits de l’Homme. Le retard extrême du Vietnam et l’inanité des réponses qu’il apporte montre à quel point les droits économiques, sociaux et culturels sont le cadet de ses soucis, ce qui est très étrange pour un pays qui se dit « socialiste » », a commenté Vo Van Ai. « En dehors du sort de toutes les populations vulnérables du Vietnam, il est très inquiétant de constater qu’elles n’ont aucun moyen efficace de recours contre les violations dont elles sont victimes et que les défenseurs des droits de l’Homme qui prennent leur défense sont systématiquement réprimé ».

Le rapport du Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme et de la FIDH met en lumière le fossé grandissant entre riches et pauvres ainsi que les inégalités sociales. Depuis que le Vietnam s’est ouvert à l’économie de marché dans le cadre de la politique du « doi moi » (rénovation) à la fin des années 1980s, le pays a connu une croissance rapide et son économie s’est transformée. Cependant une libéralisation économique sous le contrôle politique du Parti unique a conduit au creusement des inégalités entre l’élite dirigeante et le reste de la population. Alors que le Vietnam se range parmi les premiers pour l’augmentation du nombre des super-riches (ayant plus 30 millions de dollars US), un Vietnamien sur cinq vit aujourd’hui sous le seuil de pauvreté et 8% vivent dans l’extrême pauvreté. Des millions d’autres se trouvent juste au dessus du seuil de pauvreté et restent très vulnérables au moindre à-coup.

Les inégalités sociales ne sont pas seulement dues à l’écart grandissant des revenus mais également aux discriminations fondées sur les opinions politiques, les appartenances religieuses ou les origines ethniques. Le rapport cite ainsi les recherches sur le terrain de la Banque Mondiale qui montrent que les personnes n’ayant pas de connexions avec le Parti Communiste du Vietnam sont traitées plus défavorablement pour ce qui est de leur accès à la santé, à l’éducation, à l’emploi et à la terre.

Les expulsions forcées et les confiscations des terres par l’État en vue de projets de développement, aggravées par la corruption des fonctionnaires et les abus de pouvoir, laissent des centaines de milliers de paysans sans domicile et ont été à l’origine d’affrontements avec les forces de l’ordre à Van Giang, Vu Ban, Con Dau, Duong Noi et ailleurs. Les grèves se multiplient dans les ateliers-bagne à cause des conditions de travail déplorables et des bas salaires, mais la Confédération du Travail du Vietnam, le syndicat officiel, ne prend aucune mesure pour protéger les droits des ouvriers. Le travail des enfants se répand et le rapport cite une circulaire de 2013 qui le légalise pour les enfants de 13 à 15 ans.

Les citoyens vietnamiens qui dénoncent ces violations sont victimes de harcèlements, d’actes d’intimidation et d’emprisonnement. Le Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme et la FIDH ont dénombré des dizaines de cas de blogueurs, de militants des droits des paysans et des travailleurs, de défenseurs des droits de l’Homme et de membres des minorités religieuses détenus pour avoir voulu protéger les droits économiques, sociaux et culturels. Lors d’un unique procès en janvier 2013, 22 militants écologistes non-violents ont été condamnés pour « subversion » à des peines allant de 10 ans d’emprisonnement à la détention perpétuelle. A Tuyen Quang, sept membres de la minorité ethnique H’mongs ont été emprisonnés en mars 2014 simplement pour avoir pratiqué leur religion. La plupart des ces personnes, militants ou autres, ont été poursuivies sous l’empire des articles fourre-tout du Code pénal, comme ceux concernant l’« abus des libertés démocratiques » ou la « propagande contre l’État », qui sont incompatibles avec le PIDESC.

Présentant le rapport conjoint VCHR-FIDH, M. Vo Van Ai a dénoncé l’utilisation de la loi comme un outil pour étouffer les droits de l’Homme et maintenir le contrôle politique des dirigeants sur le pays. Les lois sur les syndicats, les publications, le cinéma ou l’héritage culturel, le décret 97 sur la recherche scientifique, le décret 72 sur l’internet, le décret 92 sur la religion ainsi que nombre d’autres réglementations restreignent en effet les pratiques culturelles, spirituelles et religieuses. « Le rapport périodique du Vietnam cite une foule de lois et règlements mais ne donne aucune information ni sur leur contenu ni sur leur application. Trente deux ans avec l’accession du Vietnam au PIDESC, ses citoyens sont toujours privés de leurs droits fondamentaux », a-t-il dit.

M. Vo Van Ai a également dénoncé la censure au Vietnam. Il a cité l’exemple de la traduction en vietnamien du livre de Thomas Bass, “The Spy who loved us” (sur Pham Xuan An, ancien correspondant du Time et espion du régime de Hanoi), tout récemment publiée, qui est censurée en 444 endroits, en dépit des engagements du Vietnam envers l’auteur. Par ailleurs, la censure sur internet a forcé nombre de sites et blogs vietnamiens à être hébergés en dehors du pays.

Il a également fait part de son inquiétude concernant l’enseignement de l’histoire au Vietnam. Le seul manuel d’histoire utilisé dans les écoles est publié par l’État. Or, non seulement il donne à de nombreuses reprises une version mensongère de l’histoire, mais en plus le discours adopté a plus à voir avec la propagande politique qu’avec le discours scientifique et incite les enfants à la haine. De nombreux universitaires vietnamiens dénoncent aussi cette « politisation » de l’histoire et souhaiteraient recourir à d’autres outils pédagogiques.

Le rapport de la FIDH et le Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme se conclut par 37 recommandations pour améliorer la situation des droits de l’Homme au Vietnam qui touchent le commerce et les droits de l’Homme, les droits syndicaux, la santé et l’éducation, la non-discrimination, le droit à la terre, la liberté d’expression et les droits culturels, l’indépendance de la justice ; ainsi que des recommandations concernant la ratification des instruments internationaux de protection des droits de l’Homme.

Voir :
– l’intervention orale de Vo Van Ai, Président du VCHR, à l’occasion de l’examen des deuxième, troisième et quatrième rapports du Vietnam concernant le PIDESC
– l’intervention orale de Penelope Faulkner, Vice-Présidente du VCHR sur les deuxième, troisième et quatrième rapports périodiques du Vietnam concernant le PIDESC

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