PARIS, 24 juin 2008 (COMITE VIETNAM POUR LA DEFENSE DES DROITS DE L’HOMME) – Alors que le Premier Ministre vietnamien Nguyen Tan Dung est en visite officielle aux Etats-Unis (23-26 juin 2008) et qu’il doit être reçu par le Président américain George W. Bush aujourd’hui, M. Vo Van Ai, Président de Quê Me : Action pour la Démocratie au Vietnam et porte-parole international de l’Eglise Bouddhique Unifiée du Vietnam (EBUV), a envoyé une lettre au Président Bush le pressant d’exiger des « progrès concrets et mesurables » dans le domaine des droits de l’Homme, en particulier la liberté religieuse, lors de son entrevue avec le Premier Ministre vietnamien.
M. Ai en appelle notamment au rétablissement du statut légitime de l’Eglise Bouddhique Unifiée du Vietnam (aujourd’hui interdite), le plus important mouvement de la société civile au Vietnam et « une voix essentielle du peuple sans voix du Vietnam ». Il en appelle également au transfèrement urgent du Patriarche de l’EBUV Thich Huyen Quang vers Saigon pour des soins médicaux. Le Patriarche Thich Huyen Quang, très malade, est traité à l’Hôpital Général Quy Nhon dans la province de Binh Dinh depuis le 28 mai 2008 pour de graves problèmes respiratoires. Bien qu’il ait un besoin urgent de soins spécialisés, les autorités vietnamiennes refusent qu’il soit emmené à Saigon où ces soins pourraient lui être prodigués. M. Ai a averti que la vie du Patriarche de l’EBUV pourrait être en « danger » si le Vietnam ne prenait pas de mesures urgentes pour lever son interdiction de voyager.
Il presse également le Président Bush de soulever le cas du deuxième dignitaire de l’EBUV et éminent dissident Thich Quang Do : « Le Très Vénérable Thich Quang Do, qui a été proposé pour le Prix Nobel de la Paix 2008, est aujourd’hui un citoyen hors-la-loi, privé de ses droits civiques. Relâché lors d’une amnistie gouvernementale en 1998, puis détenu sous la surveillance et le contrôle stricts de la police, Thich Quang Do ne s’est jamais vu délivrer son permis de résidence ou « ho khau ». Sans ce document, il est susceptible d’être arrêté à tout moment. Thich Quang Do n’a pas le droit de prêcher au Monastère Zen Thanh Minh à Saigon. La police le surveille derrière sa porte et l’empêche de s’approcher du microphone pour s’adresser à sa congrégation ».
Notant que le Président Bush a prévu de souligner son attachement au respect des droits de l’Homme au rendez-vous d’aujourd’hui, M. Ai a regretté que cet attachement ne soit pas « partagé par le Premier Ministre Dung et les dirigeants du Vietnam communiste ». L’an dernier, le Président du Vietnam Nguyen Minh Triet a dit au Président Bush que « le Vietnam n’avait pas besoin d’améliorer sa situation des droits de l’Homme » car sa perception des droits de l’Homme était « différente » de celle des Etats-Unis. Le Président Triet a ensuite « mis en pratique ses paroles en poursuivant l’une des pires campagnes de répression contre la dissidence qu’a connue le Vietnam, condamnant nombre de démocrates, de syndicalistes, de défenseurs des droits de l’Homme et de dignitaires religieux simplement pour leurs appels non-violents en faveur de réformes démocratiques » en 2007.
« La coopération bilatérale sur le commerce, la sécurité ou l’intégration économique régionale ne peut pas être bâtie sur ce dialogue de sourds », dit Vo van Ai. « Tous les Etats membres de l’ONU ont l’obligation de respecter les droits de l’Homme garantis dans la Charte des Nations Unies et le Vietnam ne fait pas exception à la règle. Les droits de l’Homme sont la clef du développement durable et de la prospérité économique. Ils sont également indispensables à la sécurité internationale. Comment le Vietnam pourrait-il jouer son rôle convenablement au Conseil de Sécurité de l’ONU si, lui-même, crée de l’insécurité chez lui en réprimant les droits de ses propres citoyens ? »
La liberté religieuse demeure une « préoccupation urgente et fondamentale » au Vietnam, souligne M. Ai. « Lorsque la Commission américaine sur la Liberté Religieuse Internationale (USCIRF) a mené sa mission d’enquête au Vietnam, en octobre 2007, le Premier Ministre Dung a dit à ses membres qu’il n’y avait pas de violations de la liberté religieuse au Vietnam. Toutefois la USCIRF a découvert des violations si graves et si généralisées qu’elle a recommandé de remettre le Vietnam sur la liste des « Pays Particulièrement Préoccupants » [en matière de liberté religieuse] ».
La répression contre l’EBUV s’est « intensifiée de manière alarmante » durant les préparatifs de la Journée Internationale de l’ONU du Vesak, organisée à Hanoi en mai 2008, « lorsque les pagodes de l’EBUV ont été saisies pour les célébrations de l’Eglise Bouddhiste d’Etat, les bonzes expulsés de leurs pagodes, soumis à interrogatoires et harcelés. Le bonze de l’EBUV Thich Tri Khai a été expulsé de la Pagode Giac Hai, dans la province de Lam Dong, et intensivement interrogé par la police. Il a disparu le 7 mai et n’a plus été revu depuis. Je crains qu’il n’ait été arrêté par la Sécurité ».
En conclusion, M. Ai a appelé le Président Bush à presser le Premier Ministre vietnamien de :
a) rétablir le statut légitime de l’EBUV (actuellement hors-la-loi) et garantir la liberté religieuse ;
b) lever toutes les restrictions contre le Patriarche de l’EBUV Thich Huyen Quang et son second Thich Quang Do, et rétablir tous leurs droits de citoyen (y compris la délivrance d’un permis de résidence, le droit à la liberté de mouvement et de communiquer, le droit d’avoir des activités religieuses) ;
c) autoriser le Patriarche de l’EBUV Thich Huyen Quang, qui est actuellement sous traitement pour des problèmes respiratoires et cardiaques à l’Hôpital Quy Nhon de Binh Dinh, à être transféré à Saigon où il pourra avoir accès à un traitement d’urgence spécialisé. Hospitalisé à Binh Dinh depuis le 28 mai 2008, le Patriarche de l’EBUV est gravement malade et sa vie est en danger. Les autorités locales lui ont refusé toute autorisation de voyager ;
d) rendre des comptes sur la situation du bonze de l’EBUV Thich Tri Khai qui, la dernière fois qu’on l’a vu, se trouvait en présence de la police de la province de Lam Dong, et rétablir sa fonction de Bonze Supérieur de la Pagode Giac Hai.
« Ces demandes simples mais fondamentales démontreront au Premier Ministre Dung que votre attachement aux droits de l’Homme et à la liberté religieuse au Vietnam est réel et sincère, et lui montreront que les Etats-Unis ne se contenteront pas seulement de paroles. En même temps, vous marquerez votre solidarité avec l’EBUV persécutée et donnerez espoir à des millions de démocrates opprimés au Vietnam ».