PARIS, 7 décembre 2011 (COMITE VIETNAM) – Le Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme applaudit à l’appel de fermer les soi-disant « centres de réhabilitation » pour les drogués et les prostituées lancé par le Rapporteur Spécial sur le droit à la santé, M. Anand Grover, à la suite de sa visite au Vietnam du 25 novembre au 5 décembre 2011. Dans ses commentaires sur sa visite, l’expert de l’ONU a estimé que la détention et le traitement des personnes dans ces centres perpétuaient la « stigmatisation et la discrimination » et « violaient leur droit à la santé » (1).
Le Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme avait condamné les conditions épouvantables et les détentions fréquemment abusives dans ces institutions depuis le milieu des années 1990, lorsque le gouvernement avait mise en place ces centres de réhabilitation dans le cadre de ses campagnes contre les « maux sociaux ». Des dizaines de milliers de personnes avaient alors été arrêtées, pas seulement des prostituées et des drogués mais également des vagabonds, des orphelins sans-abri, des chômeurs ou des paysans sans permis de résidence qui erraient dans les grandes villes à la recherche de travail. La presse officielle rapportait que pour la seule Ho Chi Minh Ville, le Département du Travail, des Invalides de guerre et de l’assistance publique avait admis avoir signé 9000 autorisations de détention dans ces centres « sans avoir lu les dossiers d’aucun des cas » (2).
Dans la mesure où les centres de réhabilitation sont des institutions administratives, et non des institutions judiciaires, aucun mandat d’arrêt n’est requis, et les erreurs policières ou les abus sont routiniers. A la veille des conférences internationales se tenant à Hanoi, la police se charge de « balayer les rues », évacuant vers les centres les vagabonds, dont bon nombres de jeunes filles. Les policiers reçoivent parfois des « primes » pour chaque personne envoyée dans les centres de réhabilitation, comme le Comité Vietnam en a informé les Nations Unies dans son rapport pour le CEDAW (Comité sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes) (2).
Les dissidents et ceux qui critiquent le gouvernement sont eux aussi susceptibles d’être détenus dans ces centres. Sous l’empire de l’Ordonnance 44 sur « les Régulations sur les Violations Admnistratives », la police locale peut arrêter des citoyens suspectés d’attenter à la « sécurité nationale » sans intervention du juge et les placer en détention en résidence surveillée, en institution psychiatrique ou dans des « institutions éducatives pour mauvais éléments sociaux », c’est-à-dire en centre de réhabilitation.
Le Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme se félicite de l’invitation du Rapporteur Spécial sur le droit à la santé par le Vietnam, et presse le gouvernement de mettre en œuvre ses recommandations. Nous en appelons également au gouvernment vietnamien de lancer une invitation permanente à toutes les Procédures Spéciales des Nations Unies, notamment le Rapporteur Spécial sur la liberté d’opinion et d’expression, le Rapporteur Spécial sur la liberté de religion et le Rapporteur Spécial sur les Défenseurs des Droits de l’Homme.
(1) UN Expert urges Vietnam to close down Compulsory Rehabilitation Centres for Drug users and Sex Workers, Nations Unies, Genève, 5 Décembre 2011 (en anglais),
(2) Rapport Alternatif sur la mise en œuvre de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW, Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme, Paris 2007) (en anglais),