PARIS, 31 août 2005 (CVDDH) – Le Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme (CVDDH) se réjouit de la libération de 4 prisonniers de conscience lors d’une Amnistie à l’occasion de la Fête Nationale du Vietnam (2 septembre 2005), à savoir le pasteur mennonite Nguyen Hong Quang, le prêtre catholique Nguyen Thien Phung (alias Nguyen Viet Huan, membre de la Congrégation de la Mère Co-rédemptrice), le défenseur des droits de l’Homme Tran Van Luong et Mua San So, Hmong protestant des hauts-plateaux du nord. Deux d’entre eux, le Père Nguyen Thien Phung et Tran Van Luong ont été détenus presque 20 ans dans les camps de rééducation.
M. Vo Van Ai, Président du Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme, s’est félicité des efforts sans relâche des gouvernements et des organisations non-gouvernementales qui ont joué un rôle significatif dans cette libération de prisonniers de conscience. « La désignation du Vietnam comme « pays particulièrement préoccupant » par les Etats-Unis d’Amérique à cause des violations de la liberté religieuse a un peu forcé la libération de plusieurs prisonniers religieux ». L’Amnistie de la Fête Nationale concerne trois prisonniers religieux, dont un faisait partie de la liste des prisonniers mise en avant à chaque rencontre avec le Vietnam par l’Union Européenne et ses Etats-membres.
Toutefois, M. Ai a déploré le fait que ces quatre personnes ont été détenues pour l’exercice pacifique de leurs droits fondamentaux — droits qui sont garantis par la Constitution vietnamienne — et n’auraient jamais dû être arrêtées. M. Ai a évoqué la situation tragique de M. Tran Van Luong, qui a été déclaré victime de détention arbitraire par les Nations Unies en 1999 : « Tran Van Luong (alias Truong Van Lan) avait juste 45 ans quand il a été « attrapé la main dans le sac » en train de distribuer des tracts sur les droits de l’Homme, le 9 décembre 1985, dans les rues de Ho Chi Minh Ville (Saigon Giai Phong (Saigon Libéré), 25 septembre 1988) et condamné à mort lors d’un procès inique en 1988. Détenu dans des conditions inhumaines dans le tristement célèbre camp de rééducation T5 Thanh Cam, régulièrement jeté au cachot d’isolement et privé de soins médicaux. C’est un vieux monsieur qui quitte la prison aujourd’hui, la santé complètement ruinée. Le Vietnam a volé 20 ans de la vie de Tran Van Luong, simplement parce qu’il a commis le « crime » de défendre les droits de l’Homme. Aujourd’hui, le gouvernement le libère, juste trois mois avant le terme de sa peine de 20 ans d’emprisonnement (prévue le 9 décembre 2005) et a le toupet d’affirmer qu’il bénéficie de la « clémence » du régime vietnamien. L’attitude du Vietnam est scandaleuse. Il se moque complètement de ses obligations internationales et des normes internationales en matière de droits de l’Homme ».
Après avoir pris connaissance du prononcé de la peine capitale de Tran Van Luong dans les deux lignes que lui avait accordées la presse vietnamienne en 1988, le Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme avait lancé une campagne pour sa libération ainsi que celle de deux bonzes de l’Eglise Bouddhique Unifiée du Vietnam, Thich Tue Sy et Thich Tri Sieu (alias Le Manh That) , également condamnés à mort en 1988. Grâce à la pression internationale, dont l’intervention directe des gouvernements de Suède, du Royaume-Uni et de l’Australie, leurs peines avaient été commuées en 20 ans d’emprisonnement, en 1989.
En septembre 1999, le Groupe de travail sur la détention arbitraire des Nations Unies avait déclaré Tran Van Luong victime de détention arbitraire (Avis 13/1999) pour violation par le Vietnam de l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques sur la liberté d’expression, et demandé sa libération immédiate. Le Rapporteur spécial sur la torture d’alors, Sir Nigel Rodley, avait également condamné les conditions de détention « inhumaines » que connaissait Tran Van Luong dans le camp de rééducation T5, Thanh Cam, province de Thanh Hoa, dans son rapport à la Commission des droits de l’Homme, en 1998. Il notait que Tran Van Luong souffrait de sérieux problèmes de foie et d’estomac pour lesquels on lui refusait tous soins, et qu’il était astreint aux durs travaux forcés malgré son état de santé dégradé.
Le Comité Vietnam pour la Défense des droits de l’Homme reste préoccupé par le sort de très nombreux prisonniers de conscience, toujours détenus dans des conditions extrêmement dures dans les prisons et camps de rééducation du Vietnam. Le bonze bouddhiste Thich Thien Minh, libéré au mois de février 2005 après 26 ans de détention, a confirmé ces craintes en fournissant au Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme une liste de 62 prisonniers de conscience du camp de rééducation Z30A, à Xuan Loc, province de Dong Nai, et en écrivant notamment ces lignes :
« Par exemple, il y a le Père Pham Minh Tri — il souffre de démence depuis 10 ans, mais ils le gardent dans le camp — et le Père Nguyen Duc Vinh de la Congrégation de la Mère Co-Rédemptrice. Tous deux sont détenus depuis 18 ans, et ils ne sont toujours pas libérés. Il y a également un vieil homme appartenant à la branche Hoa Hao (Buu son Ky huong). Son nom est Ngo Van Ninh. Il a 87 ans et doit marcher avec une canne. Il est terriblement faible et en très mauvaise santé, mais ils le gardent enfermé dans le camp. Il y a tellement d’autres prisonniers politiques très âgés dans le camp Z30A, des vieillards de 70-80 ans qui sont entrés dans le camp alors qu’ils étaient forts, jeunes, en bonne santé avec de vigoureux cheveux noirs. A présent, leurs cheveux sont blancs, leurs corps sont courbés, mais ils sont toujours détenus. Même s’ils étaient libérés aujourd’hui, ils ne seraient que des squelettes ambulants, bons à rien, et ils ne seront qu’une charge pour leurs familles ».
D’autres prisonniers religieux du camp Z30A sont cités par Thich Thien Minh : le Père catholique Nguyen Viet Quan, détenu depuis plus de 18 ans, le bonze bouddhiste Thich Thien Tam, les Bouddhistes Hoa Hao Le Van Chuong et Le Van Tinh, etc..
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