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Le Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme se joint à la société civile pour rejeter la fumeuse Déclaration des Droits de l’Homme de l’ASEAN

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PARIS, 19 novembre 2012 (VCHR) – Le Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme est l’une des 55 organisations de la société civile ayant signé une déclaration rejetant la fumeuse Déclaration des Droits de l’Homme de l’ASEAN (AHRD, ASEAN Human Rights Declaration, reproduite plus bas), adoptée le dimanche 18 novembre 2012 par les 10 nations de l’ASEAN lors du XXIème Sommet de l’ASEAN à Phnom Penh au Cambodge.

Avec une référence du bout des lèvres aux principes de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, la Déclaration des droits de l’Homme de l’ASEAN écarte ces principes en les assujettissant à la réalisation des droits de l’Homme dans un « contexte régional et national » et dans « différents contextes politiques, économiques, juridiques, sociaux, culturels, historiques et religieux » (Paragraphe 7), et en soulignant les principes de « non-confrontation, de rejet du deux poids deux mesures et de non-politisation » des droits de l’Homme (Paragraphe 9).

« La Déclaration des Droits de l’Homme de l’ASEAN donne aux gouvernements de l’ASEAN un véritable « permis de réprimer », une justification pour continuer à violer les droits de l’Homme de leurs citoyens », a dit le Président du Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme Vo van Ai. « C’est également un retour en arrière. La Déclaration des Droits de l’Homme de l’ASEAN réveille le spectre des « Valeurs Asiatiques » invoquées dans les années 1990s pour justifier l’exception de l’Asie au principe de l’universalité des droits de l’Homme ». M. Ai rappelle ainsi que le Vietnam et d’autres pays de l’ASEAN avaient signé la « Déclaration de Bangkok » qui en appelait à une « exception asiatique » à l’universalité au motif de « particularités nationales et régionales » et exigeait « la non-ingérence dans les affaires internes des Etats, et le non-usage des droits de l’Homme comme instrument de pression politique ». « Les « Valeurs Asiatiques » ont été vigoureusement rejetées par les Etats-membres de l’ONU lors de la Conférence Mondiale des Droits de l’Homme de Vienne en 1993 », a-t-il dit. « Aujourd’hui elles sont ressuscitées par La Déclaration des Droits de l’Homme de l’ASEAN ».

M. Ai souligne que la Déclaration des Droits de l’Homme de l’ASEAN aura un impact particulier au Vietnam. Nombre de ses articles soumettent la jouissance des droits de l’Homme aux lois nationales au lieu d’exiger des lois nationales de se conformer aux droits fondamentaux. Le Vietnam s’est engagé dans une féroce répression contre les blogueurs, les défenseurs des droits de l’Homme, les dissidents politiques et religieux au prétexte des lois fourre-tout sur la « sécurité nationale », qui sont incompatibles avec le droit international. Cette répression pourra dès lors être justifiée par la Déclaration des Droits de l’Homme de l’ASEAN.

M. Ai a également noté qu’une version du projet de la Déclaration obtenu par le Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme révélait que la plupart des articles restrictifs avaient été proposés par le Vietnam ou par son fidèle allié communiste, le Laos. Parmi ces propositions figurent celles sur les spécificités nationales, régionales et culturelles, sur l’« équilibre » à maintenir entre les droits et les devoirs, et sur les pouvoirs des Etats de restreindre les droits au motif de « moralité publique » et de « sécurité nationale ». Le Vietnam a également exprimé des réserves sur le droit à la liberté d’expression et le droit de participer librement au gouvernement. « L’influence néfaste du Vietnam plane sur la Déclaration des Droits de l’Homme de l’ASEAN », a constaté Vo An Ai. Il a également exprimé sa préoccupation sur le fait que le prochain Secrétaire général de l’ASEAN sera un Vietnamien. Le Sommet de l’ASEAN de Phnom Penh a en effet annoncé la nomination de Le Luong Minh comme nouveau Secrétaire général de l’ASEAN. Il prendra ses fonctions en janvier 2013. « C’est de mauvaise augure pour tout la région de l’ASEAN » a conclu Vo Van Ai.


La société civile dénonce l’adoption
d’une Déclaration des Droits de l’Homme de l’ASEAN
mal conçue et bien en-deçà des normes internationales

Ecartant les profondes préoccupations des hauts fonctionnaires de l’ONU, des experts des droits de l’Homme et de centaines d’organisations de la société civile au niveau national, régional et international, les dirigeants de l’ASEAN ont adopté hier une « Déclaration des Droits de l’Homme de l’ASEAN » qui sape plutôt qu’elle n’affirme les normes internationales relatives aux droits de l’Homme. Ce texte est une déclaration des gouvernements déguisée en déclaration des droits humains.

Il est déplorable que les gouvernements de l’ASEAN aient insisté pour commettre une déclaration qui implique que leurs peuples méritent moins les droits de l’Homme que les peuples d’Europe, d’Afrique ou des Amériques. Les peuples de l’ASEAN ne devraient jamais accepter un niveau de protection de leurs droits inférieur à celui du reste du monde.

La Déclaration des Droits de l’Homme de l’ASEAN aurait dû refléter la conviction universellement reconnue que le respect des droits de l’Homme implique nécessairement des limites aux pouvoirs des gouvernements. Au lieu de cela, grâce à des « Principes Généraux » pernicieux, la Déclaration qui a été adoptée va servir de justification prête-à-l’emploi pour les violations des droits fondamentaux des peuples sous juridiction des gouvernements de l’ASEAN. Ces principes dangereux comprennent la nécessité de balancer la jouissance des droits fondamentaux avec les devoirs imposés aux individus par les gouvernements, l’assujettissement de la réalisation des droits de l’Homme aux contextes régionaux et nationaux, et des limitations larges et globales aux droits énoncés dans la Déclaration, y compris des droits qui ne devraient souffrir d’aucune restriction. De nombreux articles assujettissent la jouissance des droits aux lois nationales au lieu d’exiger que les lois se conforment aux droits.

La Déclaration n’inclue pas un certain nombre de droits de base et de libertés fondamentales clefs, comme la liberté d’association et le droit protégeant les personnes des disparitions forcées.

L’ajout de dernière minute à la déclaration des dirigeants, lors de l’adoption du texte, réaffirmant l’engagement des gouvernements membres de l’ASEAN vis-à-vis de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et des autres instruments de protection des droits de l’Homme dans la mise en œuvre de la Déclaration des Droits de l’Homme de l’ASEAN, ne fait que peu pour régler le problème. Tant que les Principes Généraux de la Déclaration et que les vides juridiques qu’ils instaurent demeureront, ce sera le mauvais signal que les obligations internationales en matière de protection des droits de l’Homme peuvent être contournées, qui sera envoyé aux gouvernements.

Il est tout à fait regrettable que les gouvernements qui, au sein de l’ASEAN, sont les plus démocratiques et les plus ouverts aux droits de l’Homme, aient cédé à la pression des gouvernements hostiles à ces droits en adoptant un instrument profondément mal conçu.

Nous soulevons de nouveau nos objections au système de prise de décision de l’ASEAN fondé sur « la consultation et le consensus », qui encore une fois n’a pas servi ses peuples. Cela révèle que l’ordre du jour de l’ASEAN concernant les droits de l’Homme reste dicté par ses Etats-membres, sans consultation significative du large éventail des organisations de la société civile qui travaillent chaque jour pour les droits de l’Homme des peuples de la région ASEAN.

Cette Déclaration ne mérite pas son nom. Aussi, nous la rejetons. Nous ne l’utiliserons pas dans notre travail en tant qu’organisations engagées dans la protection des droits de l’Homme dans la région. Nous ne l’invoquerons pas dans nos adresses à l’ASEAN ou aux Etats membres de l’ASEAN, sauf pour condamner cet instrument anti-droits de l’Homme. Nous continuerons à nous reposer sur le droit et les normes internationaux en matière de protection des droits de l’Homme qui, au contraire de la Déclaration des Droits de l’Homme de l’ASEAN, fournissent aux individus, groupes et peuples de l’ASEAN la protection des libertés auxquelles ils ont droit. Nous rappelons aux Etats-membres de l’ASEAN que leurs obligations internationales doivent prévaloir en cas de conflit avec les clauses de cette Déclaration. Cette Déclaration ne devrait jamais constituer une excuse pour la défaillance d’un Etat à se conformer à ses obligations internationales.

Signée par :

1. Aliansi Masyarakat Adat Nusantara
2. ALTSEAN Burma
3. Amnesty International
4. Arus Pelangi
5. ASEAN Watch Thailand
6. Asian Center for the Progress of the Peoples (ACPP)
7. Asian Forum for Human Rights and Development (FORUM-ASIA)
8. ASEAN LGBTIQ Caucus
9. ARTICLE 19
10. Boat People SOS
11. Burma Partnership
12. Cambodian Food and Service Workers’ Federation (CFSWF)
13. Cambodian Human Rights and Development Association (ADHOC)
14. Cambodian Independent of Civil-Servant Association (CICA)
15. Cambodian League for the Promotion and Defense of Human Rights (LICADHO)
16. Cambodian Workers Center for Development (CWCD)
17. Cambodian Youth Network (CYN)
18. Coalition of Cambodian Farmer Community (CCFC)
19. Forum for Democracy in Burma
20. Forum LGBTIQ Indonesia
21. Human Rights Defenders-Pilipinas (HRDP)
22. Human Rights Education Institute of Burma (HREIB)
23. Human Rights Watch
24. IMPARSIAL (The Indonesian Human Rights Monitor)
25. Independent Democratic of Informal Economy Association (IDEA)
26. Indonesia for Human’s
27. Informal Service Center (INSEC)
28. International Commission of Jurists (ICJ)
29. Fédération Internationale des Ligues des Droits de l’Homme (FIDH)
30. International Gay and Lesbian Human Rights Commission (IGLHRC)
31. Justice for Sisters, Malaysia
32. Knowledge and Rights with Young People Through Safer Spaces (KRYSS)
33. Lao Movement for Human Rights
34. Lawyers For Liberty (Malaysia)
35. Lawyers’ Rights Watch Canada
36. Migrant Forum in Asia (MFA)
37. Myanmar Youth Empowerment Program
38. Myanmar Youth Forum
39. NGO Coordinating Committee on Development (NGO-COD), Thailand
40. People’s Action for Change, Cambodia
41. People’s Solidarity for Participatory Democracy (PSPD)
42. People’s Watch (India)
43. Philippine Alliance of Human Rights Advocates (PAHRA)
44. Philippine Human Rights Information Center (PHILRIGHTS)
45. Philippine NGO Coalition on the UN Convention on the Rights of the Child
46. Quê Me: Action for Democracy in Vietnam
47. Sayoni, Singapore
48. Seksualiti Merdeka, Malaysia
49. South East Asian Committee for Advocacy (SEACA)
50. Suara Rakyat Malaysia (SUARAM)
51. Task Force Detainees of the Philippines (TFDP)
52. Thai Volunteer Service (TVS)
53. The Commission for Missing Persons and Victims of Violence (Kontras)
54. Towards Ecological Recovery and Regional Alliance (TERRA)
55. Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme

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