PARIS, 3 mai 2012 (BIIB) – De hauts dignitaires de l’Eglise Bouddhique Unifiée du Vietnam (EBUV, Eglise historique et indépendante, arbitrairement interdite depuis 1981) font rapport d’un accroissement des menaces et des pressions par la Sécurité et les autorités locales des provinces de Thua Thien-Hue, Quang Nam-Danang, Phu Yen et Binh Thuan visant à interdire l’EBUV d’organiser les célébrations du Vesak (Naissance du Bouddha), qui doivent avoir lieu le 5 mai 2012.
Les 29 et 30 avril respectivement, le Vénérable Thich Thanh Quang, Secrétaire général de l’Institut Exécutif de l’EBUV (Vien Hoa Dao) et le Vénérable Thich Thien Hanh, Chef du Comité d’organisation du Vesak et d’EBUV et du Comité provincial de l’EBUV de Thua Thien-Hue, ont envoyé des rapports urgents au Patriarche de l’EBUV Thich Quang Do pour décrire la tension croissante entre les autorités et l’EBUV, citant un nombre grandissant d’incidents de harcèlements, menaces et restrictions par la Sécurité et les autorités locales contre les activités de l’EBUV depuis plusieurs jours.
Alors que l’Eglise Bouddhiste du Vietnam (EBV), l’Eglise d’Etat, organise une célébration massive du Vesak 2012 avec la collaboration du Comité populaire local à Hue et les villages adjacents de Huong Tra et Huong Thuy, dans le cadre de l’« Année Nationale du Tourisme », afin de démontrer que « le Vietnam respecte la liberté religieuse », l’EBUV s’est vue interdite de célébrer publiquement le Vesak sous son nom. Cette année, afin de célébrer le Vesak mais aussi de marquer la 37ème année de répression contre l’EBUV, depuis la prise de pouvoir du Parti Communiste en 1975, l’EBUV à Hue a prévu une grande cérémonie à la Pagode Quoc An. Pour cet événement, l’EBUV a créé une sculpture qui sera exposée sur tous les autels des pagodes de l’EBUV lors du Vesak. Cette sculpture, qui représente un globe terrestre entouré des mots « Eglise Bouddhique Unifiée du Vietnam », symbolise la présence mondiale de l’EBUV, dont les membres se trouvent dans 80 pays dans le monde. Toutes les pagodes appartenant à l’EBUV dans la province de Thua Thien-Hue, dont celles de Long Quang, Kim Quang, Phuoc Thanh, Phuoc Hai, Bao Quang et Tho Duc, exposeront cette sculpture sur leurs autels élevés pour leurs propres congrégations.
Depuis que les autorités ont découvert cette sculpture, la police a systématiquement pris contact avec les artistes commissionnés par l’EBUV pour le reproduire et les a forcés à signer des promesses de cesser ce travail ou à s’exposer à de très fortes amendes. En dépit des menaces policières, sept sculptures ont été faits. Cependant, alors que les Bouddhistes élevaient leurs autels, le 26 avril 2012, de gros contingents de la Sécurité ont fait irruption dans les pagodes, harcelant les fidèles et ordonnant aux bonzes de détruire immédiatement les sculptures et de tout ce qui portait le nom de l’« Eglise Bouddhique Unifiée du Vietnam », sous prétexte que l’EBUV était « une organisation illégale ».
Le 26 avril encore, le Comité populaire de Vinh Ninh convoquait le bonze de l’EBUV Thich Dieu Tanh, Bonze Supérieur de la Pagode Quoc An, pour un interrogatoire. Il a refusé de s’y rendre mais a envoyé à sa place Thich Minh Chon. Les cadres et les policiers ont strictement interdit au bonze de montrer le moindre signe ou bannière de l’EBUV « illégale » le jour des célébrations du Vesak, ce week-end. Le même jour, cinq cadres de la Police Religieuse d’Etat, du Comité populaire et d’autres organismes gouvernementaux se sont rendus à la Pagode Tho Duc, dans le district de Thuy Xuan. Ils y ont dressé un acte d’accusation contre le Bonze Supérieur Thich Chon Phuong pour avoir élevé un autel où figurait le mot EBUV, et lui ont ordonné démonter immédiatement l’autel. Thich Chon Phuong a refusé de signer l’acte d’accusation. Thich Chon Niem, Bonze Supérieur de la Pagode Bao Quang, a été sujet à pareil traitement par la police et les cadres, le même jour. Le 28 avril 2012, les autorités locales ont émis une déclaration contre Thich Chi Thang, Bonze Supérieur de la Pagode Phuoc Hai, lui ordonnant de démanteler l’autel du Vesak dans les deux jours (jusqu’au 30 avril) sans quoi la police le détruirait de force. Thich Minh Sieu, Bonze Supérieur de la pagode a également refusé de contresigner le procès verbal de la police.
Face à la répression grandissante des célébrations en cours du Vesak, Thich Thien Hanh a appelé à une réunion du Comité d’organisation du Vesak de l’EBUV à la Pagode Quoc An, le 29 avril 2012. Les bonzes y ont pris la décision de défendre la commémoration sacrée du Vesak que les Bouddhistes célèbrent au Vietnam depuis 2000 ans, et donc :
1) de refuser résolument de signer tout acte d’accusation dressé par les autorités locales et de ne pas tenir compte de tout ordre de démanteler les autels ou les interdictions de célébrer le Vesak ; de refuser de reconnaître la légitimité des autorités locales pour donner des ordres sur les activités de l’EBUV. L’EBUV est une organisation à échelle nationale et internationale. Tout interdiction à son endroit doit venir du gouvernement central avant que celle-ci puisse être prise en considération par la direction de l’EBUV ;
2) si les autorités locales de Thua Thien-Hue persistaient à harceler et poser des restrictions pendant le Vesak, d’appeler les bonzes, nonnes et fidèles de l’EBUV à s’opposer à la répression par une résistance non-violente, par des sit-ins et des prières ;
3) si les autorités utilisaient la force pour réprimer les célébrations du Vesak dans une seule pagode de l’EBUV, d’appeler tous les bonzes, nonnes et fidèles à se rassembler à la Pagode Quoc An à 6 heures du matin le jour du Vesak (5 mai 2012), en apportant toutes les sculptures et toutes les bannières portant le nom de l’EBUV, pour célébrer le Vesak ensemble. Après la cérémonie de prière, les sculptures seront brûlées en offrande au Bouddha. Tout Bouddhiste qui sera intercepté par la police sur le chemin de la pagode Quoc An devra immédiatement tenir un sit-in, réciter les prières et opposer une résistance non-violente à la politique de discrimination religieuse du gouvernement et aux violations massives du droit à la liberté de croyance des Bouddhistes et de tous les citoyens du Vietnam.
La Sécurité continue d’encercler la Pagode Giac Minh, siège du Comité provincial de l’EBUV et du Mouvement Bouddhiste de la Jeunesse, filmant tous ceux qui approchent la pagode et empêchant les Bouddhistes d’entrer (voir le communiqué de presse du BIIB du 28 avril 2012). Le 28 avril 2012, le Comité populaire local à Binh Hien (Danang) a convoqué Thich Thanh Quang et la communauté des bonzes et nonnes de la Pagode Giac Minh à comparaître devant une « session de dénonciation » publique devant une foule d’habitants locaux. Thich Thanh Quang a refusé de s’y rendre mais a envoyé à sa place un jeune bonze, Thich Thong Lai. Thich Thong Lai a rapporté que les cadres locaux du Parti et de la police religieuse avaient incité la population à dénoncer la Pagode Giac Minh pour ses activités « réactionnaires » et son appartenance à l’EBUV interdite. Le 3 mai 2012, Thich Thong Lai a été de nouveau convoqué par la police pour interrogatoire.
Le Vénérable Thich Giac Hieu, chef du Comité provincial de l’EBUV de Phu Yen, a rapporté que de nombreux bonzes et nonnes, ainsi que des membres du Mouvement Bouddhiste de la Jeunesse de l’EBUV, avaient été convoqués par les autorités locales pour les « sessions de travail » (interrogatoires de police) durant les derniers jours et été avertis des « conséquences sérieuses » qu’ils auraient à subir s’ils tentaient d’assister aux célébrations du Vesak à Phu Yen, ce week-end.
Le Vénérable Thich Thong Hai, Commissaire à la Jeunesse de l’EBUV pour la province de Binh Thuan, a été convoqué de façon répétée au siège de Comité populaire pour interrogatoire. Les autorités locales ont menacé de prendre des « mesures préventives » s’il tentait d’organiser les célébrations du Vesak dans la province de Binh Thuan (voir le communiqué de presse du BIIB du 28 avril 2012).
Les membres des 20 Comités provinciaux de l’EBUV dans tout le centre et le sud du pays font état de harcèlements, menaces et restrictions similaires durant les dernières semaines.