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Le Parlement Européen condamne les sentences contre les journalistes et l’escalade de la répression contre la dissidence au Vietnam

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PARIS, 21 janvier 2021 (VCHR) – Le Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme (VCHR) se félicite de l’adoption, aujourd’hui à Bruxelles, par le Parlement Européen (PE) d’une résolution très forte sur « sur la situation des droits de l’homme au Viêt Nam, en particulier le cas des journalistes défenseurs des droits de l’homme Pham Chi Dung, Nguyen Tuong Thuy et Le Huu Minh Tuan ». Cette résolution a été proposée conjointement par les sept groupes politiques représentant l’ensemble du spectre politique[i] de l’assemblée de 705 membres.

« Cette Résolution très pertinente arrive à point nommé », a dit le Président du VCHR Võ Văn Ái. « Elle envoie un message très fort au Parti Communiste du Vietnam à la veille de son XIIIe Congrès à Hanoi et constitue aussi un appel du pied au nouveau Président américain Joe Biden à travailler ensemble avec l’Europe et ses États-membres pour obtenir des améliorations tangibles en matière de droits de l’Homme au Vietnam ».

Le texte de la Résolution dénonce un large éventail de violations des droits de l’Homme, notamment le sort déplorable des prisonniers politiques. Il note que le Vietnam « détient actuellement le plus grand nombre de prisonniers politiques en Asie du Sud-Est » et ajoute que le PE « est consterné par l’intensification de la répression de la dissidence et les violations croissantes des droits de l’homme au Viêt Nam et condamne ces politiques, notamment les condamnations, l’intimidation politique, la surveillance, le harcèlement, les agressions, les procès inéquitables et les exils forcés subis par des militants politiques, des journalistes, des blogueurs, des membres de l’opposition, des dissidents et des défenseurs des droits de l’homme pour avoir exercé leur liberté d’expression, autant d’actes qui enfreignent manifestement les obligations internationales qui incombent au Viêt Nam ».

La Résolution exprime la préoccupation particulière des parlementaires concernant les arrestations et condamnations arbitraires de Phạm Chí Dũng, Nguyễn Tường Thụy et Lê Hữu Minh Tuấn, fondateur et membres de l’Association des Journalistes Indépendants du Vietnam. Les trois hommes, qui ont écrit sur « la mauvaise gestion et la corruption au sein du gouvernement », les droits humains et la démocratie, ont été inculpés pour avoir « fabriqué, stocké et diffusé des informations, du matériel et des objets en vue de s’opposer à l’État ». Phạm Chí Dũng a été condamné à 15 ans de prison et ses deux collègues à 11 ans chacun, peines assortis de trois ans de d’assignation à résidence supplémentaires. Phạm Chí Dũng était également poursuivi pour « avoir coopéré avec des médias étrangers en vue de diffuser de fausses informations » pour avoir envoyé un message vidéo aux parlementaires européens les pressant de repousser la ratification de l’Accord de Libre-échange entre l’UE et le Vietnam (EVFTA) tant qu’il n’y aurait pas d’amélioration réelle de la situation des droits de l’Homme. Ce message vidéo avait été envoyé au VCHR et projeté lors d’une conférence au Parlement Européen le 3 décembre 2019.

Dénonçant les très dures conditions de détention, le défaut d’accès aux conseils juridiques et le déni du droit à un procès équitable, le PE a appelé le Vietnam à « libérer immédiatement et sans condition Pham Chi Dung, Nguyen Tuong Thuy et Le Huu Minh Tuan, ainsi que tous les autres journalistes, défenseurs des droits de l’homme et de l’environnement, syndicalistes et prisonniers d’opinion emprisonnés et condamnés pour avoir simplement exercé leur droit à la liberté d’expression, et à abandonner toutes les charges à leur encontre ».

La Résolution note que la plupart des défenseurs des droits de l’Homme au Vietnam sont détenus sous l’empire des « dispositions répressives » du Code pénal qui sont « appliquées de manière abusive pour réduire au silence, arrêter, détenir, condamner ou entraver les activités de défenseurs des droits de l’homme, de membres de l’opposition, d’avocats, de syndicalistes, de membres de groupes religieux ou d’organisations non gouvernementales, notamment ceux qui expriment des opinions critiques à l’égard du gouvernement vietnamien ». Elle appelle le Vietnam à amender ces dispositions, notamment les articles 117, 118 et 331 et toute autre législation liberticide comme la Loi sur la Cybersécurité ou le Décret 72 sur l’internet. La Résolution soulignent qu’une réforme du Code pénal est essentielle à toute mise en œuvre effective des Conventions 98 et 87 de l’OIT que le Vietnam a promis de ratifier. Sans cette réforme, les travailleurs risqueront l’emprisonnement pour toute critique des politiques d’État sur leur lieu de travail.

Le texte reflète également la profonde consternation des parlementaires européens devant la dégradation de la situation des droits de l’Homme au Vietnam en dépit de l’entrée en vigueur, le 1er août 2020, de l’Accord de Libre-échange entre l’UE et le Vietnam (EVFTA). Ils rappellent donc au Vietnam ses engagements pris avec l’Accord de Partenariat et de Coopération EU-Vietnam (PCA) qui est lié à l’EVFTA. LE PCA comporte une « clause des droits de l’Homme » qui autorise l’UE à prendre des « mesures appropriées » — qui incluent des sanctions et une éventuelle suspension des accords — « en cas de violations graves et systématiques des droits de l’homme ».

Lors du débat d’aujourd’hui, la députée européenne et Présidente de la Sous-commission « droits de l’Homme » du PE, a appelé à la suspension immédiate de l’EVFTA car les « violations graves existent, elles existaient et elles continueront d’exister » au Vietnam, a-t-elle dit, expliquant par ailleurs que, concernant le régime vietnamien, « je ne crois pas en sa volonté de changer en matière de droits de l’Homme ».

Déplorant la censure généralisée sur internet et les réseaux sociaux, le PE note « qu’au moins deux plateformes mondiales de réseaux sociaux se sont très bien adaptées aux mesures de censure et de restriction à la liberté d’expression du Viêt Nam, notamment en censurant les critiques exprimées pacifiquement envers l’État ». Il fait ici référence au blocage, depuis le mois d’avril 2020, des posts par Facebook et Youtube (du groupe Google) à la demande des autorités vietnamiennes. La docilité de ces entreprises est un problème grave que le VCHR dénonce régulièrement. La Vice-Présidente du VCHR Penelope Faulkner a ainsi dit que l’attitude de Facebook « a des conséquences dramatiques sur la liberté sur internet, non seulement au Vietnam mais aussi dans le monde. Le Vietnam est le premier pays en Asie du Sud-Est — et probablement dans le monde, où Facebook a publiquement reconnu sa complaisance avec la censure du gouvernement ».

La Résolution du PE soulève de nombreuses questions comme celles de la liberté de religion ou de conviction, de l’enregistrement obligatoire des confessions religieuses et de la répression des activités religieuses jugées « contraires à ‘l’intérêt national’, à ‘l’ordre public’ ou à ‘l’unité nationale’ ». Elle appelle le Vietnam à reconnaître les syndicats indépendants, à introduire immédiatement un moratoire sur la peine de mort, à améliorer les conditions de détention  insalubres qui se sont dégradées avec le risque de contamination par le COVID-19, à inviter le Rapporteur spécial de l’ONU sur la liberté d’opinion et d’expression et le Rapporteur spécial sur les défenseurs des droits de l’Homme pour des visites au Vietnam et à « leur donner un accès libre et sans restriction à toutes les parties qu’ils souhaitent consulter ».

Elle en appelle aussi à l’établissement de mécanismes indépendants de surveillance et de plainte au profit des victimes des violations, et presse la Commission Européenne et son Service européen pour l’action extérieur (EEAS) à réaliser des études d’impact sur les droits de l’Homme pour évaluer les effets de l’EVFTA sur les droits humains au Vietnam.

En conclusion, la Résolution appelle « les États membres, de préférence avant le 13e congrès national du parti communiste du Viêt Nam, à exprimer avec force leurs préoccupations concernant l’aggravation de la situation des droits de l’homme au Viêt Nam; encourage l’Union et ses États membres à intensifier leurs efforts internationaux pour promouvoir, au sein du Conseil des droits de l’homme des Nations unies, une initiative conjointe avec des partenaires partageant les mêmes valeurs, et en particulier avec la nouvelle administration des États-Unis d’Amérique, en vue d’œuvrer à des améliorations concrètes en matière de droits de l’homme au Viêt Nam ».


[i] Les sept groupes politiques du PE sont : Groupe du Parti populaire européen (Démocrates-Chrétiens)  (PPE) ; Groupe de l’Alliance Progressiste des Socialistes et Démocrates au Parlement européen (S&D) ; Groupe Renew Europe ; Groupe des Verts/Alliance libre européenne ; Groupe Identité et Démocratie ; Groupe des Conservateurs et Réformistes européens ; Le groupe de la gauche au Parlement européen (GUE/NGL)

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