En dépit de l’accession du Vietnam aux principaux traités de protection des droits de l’Homme et de l’adoption d’une législation nouvelle et nombreuse, un large fossé existe toujours entre les normes internationales d’une part et les lois et pratiques vietnamiennes d’autre part. Le Vietnam continue d’adopter des textes restreignant l’exercice des droits humains et d’emprisonner les opposants non-violents sous des motifs vagues de « sécurité nationale » en dépit des recommandations des procédures spéciales de l’ONU. La détention administrative, la répression religieuse, l’écrasement des défenseurs des droits de l’Homme, l’étouffement de la liberté de la presse, le recours fréquent à la peine de mort constituent de sérieuses préoccupations, tout comme les violations des droits des femmes telles leur exploitation sexuelle et les politiques contraignantes de contrôle des naissances — le Vietnam détient l’un des taux d’avortement les plus élevé au monde. La FIDH et le Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme ont résumé ici leurs recommandations en vue de l’Examen Périodique Universel du Vietnam :
- Mettre en conformité la législation nationale vietnamienne avec les traités internationaux de protection des droits de l’Homme auxquels le Vietnam est Partie, en particulier le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) ;
- Réviser les articles fourre-tout sur la sécurité nationale du Code pénal comme « semer la division entre les religieux et les non-religieux », « saper la solidarité nationale », et abroger les aricles de la Constitution, du Code pénal et des autres lois qui conditionnent l’exercice des droits de l’Homme aux politiques et aux intérêts de l’Etat (par exemple l’article 70 de la Constitution, l’article 258 du Code pénal sur l’« abus des libertés démocratiques pour porter atteinte aux intérêts de l’Etat », l’article 2.3 de la loi sur la presse). Sept crimes contre la « sécurité nationale », qui sont passibles de la peine capitale, ne font pas la distinction entre les actes violents comme le terrorisme, et l’exercice pacifique des libertés fondamentales. Ces dispositions sont une grave menace à la protection constitutionnelle et législatives des droits humains ;
- Réviser l’article 80 du Code pénal sur l’« espionnage » qui concerne non seulement les secrets d’Etat mais également tout « autre information et documents ». Largement Invoqué pour détenir les citoyens exprimant des points de vue sur internet, cet article prévoit la peine de mort comme sentence maximale ;
- Abroger l’Ordonnance 44 sur la détention administrative qui légalise la détention sans procès ; abolir la « zone de non-droit » créée par la détention préventive illimitée, la détention probatoire et la pratique de l’assignation à résidence par voie d’» ordre oral » avec restriction à la liberté de mouvement et de communiquer ;
- Démanteler le triptyque de contrôle de la population constitué par le permis de résidence (ho khau), le policier de secteur et le curriculum vitae, qui empêche les paysans migrant vers les villes d’avoir accès à l’éducation, aux services de santé et autres services sociaux, et qui est employé pour la discrimination contre les groupes religieux et politiques ainsi que les minorités ethniques ;
- Mettre fin à la censure en abrogeant les articles des lois sur la presse et les publications, ainsi que le Décret sur l’internet et les blogs qui restreignent la liberté d’expression et de la presse, et autoriser la publication des journaux indépendants ;
- Rétablir le statut légitime de l’Eglise Bouddhique Unifiée du Vietnam (EBUV) et de toutes les autres organisations religieuses « non-reconnues », et garantir leur pleine liberté d’activité ;
- Cesser les harcèlements, les arrestations et la répression contre les Bouddhistes, les Catholiques, les Protestants, les Hoa Hao, les Bouddhistes Khmers Krom et les membres de toute les autres confessions qui défendent la liberté religieuse ;
- Mettre fin à la discrimination contre les Montagnards, les Khmers Krom et les autres groupes ethniques minoritaires ;
- Autoriser les partis politiques indépendants et abroger les dispositions législatives qui y font obstacle, en particulier l’article 4 de la Constitution sur le monopole du Parti Communiste sur toutes les affaires de l’Etat et de la société ;
- Réviser le Code du Travail afin de réduire les restrictions au droit de grève ; autoriser les syndicats libres ne dépendant pas de la Confédération Générale du Travail du Vietnam ;
- Réviser le Décret 88 sur les Associations pour permettre la constitution d’associations civils indépendantes ne dépendant pas du Parti Communiste ou du Front de la Patrie ;
- Réduire les crimes passibles de la peine capitale ; cesser de classer les statistiques sur les exécutions et les condamnation à la peine de mort parmi les « secrets d’Etat », et se diriger vers l’abolition de la peine de mort ;
- Améliorer la situation des droits des femmes en renforçant la législation anti-traite, mettre fin au contrôle des naissances par le recours forcé à l’avortement, et mettre en œuvre la Loi sur la terre pour assurer aux femmes leurs droits sur la terre ;
- Coopérer avec les mécanismes internationaux de protection des droits de l’Homme en posant une invitation permanente pour les Rapporteurs spéciaux de l’ONU sur les Défenseurs des droits de l’Homme, sur la Liberté d’expression, sur la Liberté de religion et de croyance, et pour le Groupe de travail sur la détention arbitraire.