PARIS, 31 mars 2016 (FIDH & VCHR): L’incarcération, fondée sur des lois scélérates, de deux blogueurs et de quatre femmes activistes en l’espace de huit jours révèle une inquiétante escalade de répression gouvernementale à l’encontre des dissidents, ont déploré la FIDH et son affiliée, le Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme (VCHR).
« La récente vague d’emprisonnement arbitraire de blogueurs et autres activistes est une illustration de la sauvagerie avec laquelle le gouvernement traite la dissidence non-violente. Le Vietnam doit immédiatement mettre un terme à cette répression grandissante et libérer tous les prisonniers politiques », a dit le Président de la FIDH Karim Lahidji.
Le 30 mars 2016, le Tribunal populaire de Ho Chi Minh Ville a condamné le blogueur Nguyễn Đình Ngọc, alias Nguyễn Ngọc Già, à 4 ans de prison et 3 ans d’assignation à résidence pour « propagande contre la République Socialiste du Vietnam » (article 88 du Code pénal). Cette peine fait suite à l’arrestation de Nguyễn Đình Ngọc, le 27 décembre 2014, à son domicile à Ho Chi Minh Ville, pour « activités illégales ». Ngọc était accusé d’avoir écrit, de février à décembre 2014, nombre d’articles critiques à l’égard du gouvernement sur divers blogs. Selon l’acte d’accusation, la police a été informée des agissements de Ngọc par l’entreprise d’Etat Saigon Postel Corporation, fournisseur d’accès à internet. Cette société avait surveillé les activités de Ngọc sur internet et porté plainte contre lui pour avoir « cherché à salir la réputation du Parti Communiste ».
Ce même 30 mars 2016, mais dans une affaire différente, le Tribunal de Ho Chi Minh Ville a condamné trois femmes à des peines de prison allant jusqu’à 4 ans sur la base du même article 88 du Code pénal. Ngô Thị Minh Ước, âgée de 57 ans, a été condamnée à 4 ans d’emprisonnement, tandis que Nguyễn Thị Trí et Nguyễn Thị Bé Hai, toutes deux âgées de 58 ans, ont pris 3 ans chacune. Le tribunal leur a également infligé de 3 à 2 ans d’assignation à résidence en complément de leur peine de prison. Toutes trois ont été reconnues coupables d’avoir brandi le drapeau de l’ancienne République du (Sud) Vietnam et scandé des slogans anti-Etat devant le Consulat américain à Ho Chi Minh Ville, le 7 juillet 2014, lors d’une protestation contre les confiscations des terres. Ngô Thị Minh Ước, Nguyễn Thị Trí et Nguyễn Thị Bé Hai sont des « Victimes d’injustice », mouvement qui fait campagne contre les confiscations des terres, les expulsions forcées, les brutalités policières et les détentions arbitraires au Vietnam. Toutes trois ont été détenues depuis leur arrestation à cette manifestation.
Ces peines d’emprisonnement interviennent une semaine après la condamnation d’un autre blogueur et de sa collaboratrice sous prétexte d’une autre de ces lois scélérates. Le 23 mars 2016, un tribunal de Ho Chi Minh Ville a condamné le blogueur Nguyễn Hữu Vinh et son assistante Nguyễn Thị Minh Thuý à respectivement 5 et 3 ans de prison pour « abus des libertés démocratiques pour nuire aux intérêts de l’Etat » (article 258 du Code Pénal). Tous deux étaient accusés d’avoir « publié en ligne des articles au contenu malicieux et des informations trompeuses pour abaisser le prestige des agences du gouvernement, des organisations sociales et des citoyens et créer la méfiance publique à leur égard ».
« Les dispositions draconiennes du Code pénal vietnamien n’ont pas leur place dans le système légal d’un pays qui vise à devenir un partenaire commercial privilégié de l’Union Européenne et des Etats-Unis. Washington et Bruxelles devraient utiliser tous les moyens de pression économiques et politiques pour exiger une révision urgente et totale de ses lois répressives », a dit le Président du VCHR Võ Văn Ái.
Les amendements au Code Pénal adoptés par l’Assemblée Nationale vietnamienne le 27 novembre 2015 n’ont pas abrogé nombre de dispositions incompatibles avec les obligations internationales du Vietnam. Outre les articles 88 et 258, il s’agit notamment des articles 79 (« activités visant à renverser l’administration du peuple »), 80 (« espionnage ») et 87 (« attenter à la solidarité nationale, semer la division entre les personnes religieuses et les non-religieuses ») (1). Les autorités vietnamiennes recourent de façon répétée à ces dispositions pour étouffer le droit à la liberté d’opinion et d’expression et pour arrêter ceux qui critiquent le gouvernement.
La FIDH et le VCHR n’ont eu de cesse de dénoncer et d’appeler à l’abrogation de ces dispositions sur la « sécurité nationale » qui sont absolument incompatibles avec les engagements du Vietnam au regard du Pacte international relatifs aux droits civils et politiques.
Le Vietnam détient environ 130 prisonniers politiques, soit le plus gros contingent de tous les Etats membres de l’Association des Nations d’Asie du Sud-Est (ASEAN).
(traduction par le Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme)
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La FIDH (Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme) est une ONG internationale de défense des droits humains. Elle regroupe 178 organisations nationales de défense des droits humains dans 120 pays. Depuis 1922, la FIDH est engagée dans la défense de tous les droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels tels que définis dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme. Le CVDDH est une affiliée de la FIDH.