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Vietnam : le rapport du gouvernement pour l’Examen Périodique Universel dissimule les graves violations des droits de l’Homme

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PARIS, 4 septembre 2018 (VCHR & FIDH) – Le projet de rapport préparé par le gouvernement vietnamien pour son prochain Examen Périodique Universel (EPU) dissimule les graves violations des droits humain et désinforme de manière délibérée la communauté internationale, ont dit aujourd’hui la FIDH et son affiliée, le Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme (VCHR). Le troisième EPU du Vietnam doit avoir lieu le 22 janvier 2019 devant l’ONU, à Genève en Suisse.

« Dans sa forme actuelle, le rapport du gouvernement pour l’EPU révèle l’incapacité de Hanoi de reconnaître les problèmes des droits humains et son manque de volonté politique à les régler. Le gouvernement devrait prendre en considération toutes les informations fournies par la société civile, en particulier au regard de la situation effroyable des principaux droits civils et politiques, et garantir que son rapport pour l’EPU reflète leurs préoccupations », a dit la Secrétaire-générale de la FIDH Debbie Stothard.

Depuis le précédent EPU du Vietnam en février 2014, les autorités ont intensifié leur répression contre la société civile et ceux qui critiquent le gouvernement. Entre février 2014 et juillet 2018, la FIDH et le VCHR ont comptabilisé l’arrestation ou l’emprisonnement d’au moins 160 défenseurs des droits de l’Homme et militants non-violents. Dans une soumission commune pour le prochain EPU du Vietnam, la FIDH et le VCHR ont soulevé de nombreux points très préoccupants et fait des recommandations pour améliorer la situation.

« Le rapport du gouvernement pour l’EPU est rempli de déclarations à mille lieues de la réalité qui dissimulent la féroce répression contre la société civile qui a suscité de vives critiques de la part de la communauté internationale. Dans un pays où demander la démocratie est considéré comme de la subversion, l’affirmation dans le rapport du gouvernement selon laquelle le Parti Communiste du Vietnam promeut la démocratie est tout simplement surréaliste », a dit le Président du VCHR Võ Văn Ái.

Le gouvernement prétend que son projet de rapport, qui est actuellement accessible sur le site internet du Ministère des Affaires étrangères, couvre l’ensemble des progrès des droits humains dans le pays depuis le deuxième EPU. Ci-dessous, le VCHR et la FIDH analysent brièvement les principales lacunes de ce projet de rapport.

La liberté de religion ou de conviction

Le paragraphe 46 annonce que la nouvelle Loi sur la Croyance et la Religion (qui est entrée en vigueur en janvier 2018) et ses décrets d’application ont posé « une solide base légale pour assurer une meilleure liberté de religion ou de conviction pour le peuple ». Bien au contraire, cette loi est incompatible avec l’article 18 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), auquel est partie le Vietnam, qui garantit le droit universel à la liberté de religion ou de conviction. En effet, selon cette loi, la reconnaissance par l’État est obligatoire. Les autorités doivent être prévenues à l’avance de toute activité religieuse et elles peuvent les interdire sans explication. De nouveaux décrets imposent de lourdes amendes en cas d’activités religieuses non-autorisées. Depuis que la loi est entrée en vigueur, les autorités ont intensifié les harcèlements contre les groupes religieux non-enregistrés, comme l’Église Bouddhique Unifiée du Vietnam, les Hòa Hảo, ou certains groupes protestants issus des minorités ethniques.

La liberté d’expression et d’assemblée pacifique

Le paragraphe 51 affirme que la Loi révisée sur la Presse de 2016 « énonce clairement la liberté de la presse et la liberté d’expression » et pose le principe de « non-censure des publications et diffusions audiovisuelles ». En réalité, la Loi révisée sur la Presse a augmenté de 4 à 13 le nombre d’« actes prohibés », qui sont énoncés de façon vague et imprécise, comme le fait de publier des « informations déformées sur la République Socialiste du Vietnam » ou de « semer la division entre le peuple et l’État ». La Loi sur la Presse n’autorise pas l’existence de médias indépendants, et la censure par les autorités restent sévère. En juillet 2018, le site internet de Tuổi Trẻ, un journal d’État très lu, s’est vu interdit de publication pour trois mois et infligé une amende de 10.000 dollars US après avoir été accusé par le gouvernement de publier des informations fausses et des commentaires considérés comme « menaçant l’unité nationale ».

La peine de mort

Le paragraphe 42 déclare, à tort, que la peine de mort n’est « applicable que pour des crimes extrêmement graves ». En fait, la peine capitale concerne 18 crimes parmi lesquels on compte des crimes politiques, économiques ou touchant à la drogue qui ne se conforment pas au seuil fixés par l’ONU pour être qualifiés de « crimes les plus graves ».

L’égalité devant la loi

Le paragraphe 37 déclare que le Code de procédure pénale garantit que les procès sont équitables, que les droits des personnes détenues sont protégés et que les détenus ne sont pas forcés à faire de fausses confessions. Dans les faits, le Code de procédure pénale révisé en 2015 permet des détentions préventives virtuellement indéfinies dans les cas touchant à la « sécurité nationale », et ce en violation du droit international. De plus, le Code pénal permet de tenir les procès à huis-clos dans les affaires touchant la « sécurité nationale ». Les prisonniers sont souvent détenus incommunicado et sont l’objet de passages à tabac, qui mènent à de fréquents décès en détention. Le 16 août 2018, le militant Lê Định Lương a été condamné à 20 ans de prison sur la base de confessions arrachées de force aux blogueurs Nguyễn Văn Hoá et Nguyễn Việt Dũng. Selon l’avocat de Lương, les deux hommes ont dit qu’ils avaient été battus en prison et qu’ils avaient renié leurs confessions. Celles-ci n’en ont pas moins été utilisées par le Ministère public comme preuve contre Lương.

La coopération avec les mécanismes de l’ONU

Le paragraphe 34 affirme que le Rapporteur spécial sur la liberté de religion ou de conviction d’alors Heiner Bielefeldt « a pris note des efforts et des réalisations du Vietnam » lors de sa visite officielle dans le pays en 2014. Il s’agit là d’une grave déformation des faits. Dans son rapport sur cette mission, le Rapporteur spécial s’était dit « très préoccupé et indigné » par la surveillance intrusive de la police, les harcèlements, les actes d’intimidation et les agressions physiques contre les membres des groupes religieux non-reconnus qui avaient cherché à le rencontrer, ce qui avait abouti à l’annulation de plusieurs visites sur le terrain. M. Bielefeldt a dit que ces incidents violaient les termes de référence sur lesquels le gouvernement vietnamien avait donné son accord.

Les campagnes de sensibilisation aux droits humains

Le paragraphe 27 affirme que le gouvernement « considère l’éducation et la sensibilisation aux droits de l’Homme » comme une de ses priorités pour la promotion des droits humains. Cependant, les manuels vietnamiens de formation à destination des écoles et des universités présentent les droits humains en des termes qui sont en total contradiction avec le principe d’universalité des droits de l’Homme. Les actuels manuels de formation exigent des enseignants qu’ils présentent les droits humains ainsi : « Étant donné les différences de régimes politiques, de niveaux de développement, de valeurs culturelles et de contextes historiques, les approches des droits de l’Homme varient selon les pays. La position du Vietnam est qu’aucun pays n’a le droit d’utiliser les droits de l’Homme comme moyen ou prétexte pour s’ingérer dans les affaires internes d’un autre pays […] ».

 

Contact presse :
FIDH : Mme Maryna Chebat (anglais, français) : tél. : +33 648059157 (Paris)
FIDH : M. Andrea Giorgetta (anglais) : téL. : +66 886117722 (Bangkok)
VCHR : Mme Penelope Faulkner (anglais, français, vietnamien) : tél. : +33 611898681 (Paris)

 

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