PARIS, le 30 mai 2007 (BIIB) – Alors que les Bouddhistes du monde entier se préparent à fêter le 2551ème anniversaire de la naissance du Bouddha, ou Vesak, demain, le 31 mai 2007, les autorités vietnamiennes ont interdit à l’Eglise Bouddhique Unifiée du Vietnam (EBUV, Eglise historique, indépendante, arbitrairement interdite en 1981) de célébrer cet important événement du Bouddhisme et de faire circuler le Message du Vesak du Patriarche de l’EBUV Thich Huyen Quang, actuellement détenu. Les Bouddhistes de l’EBUV dans les provinces méridionales et centrales de Thua Thien Hue, Binh Dinh, Phu Yen, Ba Ria-Vung Tau, Tien Giang and Lam Dong ont rapporté au Bureau International d’Information Bouddhiste (BIIB) qu’ils avaient fait l’objet de harcèlements et de menaces de la part de la Sécurité vietnamienne, et qu’il leur avait été signifié l’interdiction d’organiser les cérémonies du Vesak.
Dans la cité de Hue, au centre du pays, un des centres les plus actifs du Bouddhisme indépendant, le Vénérable Thich Thien Hanh, Secrétaire général de l’Institut du Sangha de l’EBUV et Directeur du Comité provincial de l’EBUV de Hue, a informé Vo Van Ai, Directeur du BIIB, au cours d’une conversation téléphonique, que les cadres de la Sécurité vietnamienne et du P38 (police religieuse) lançaient systématiquement des menaces et harcelaient tout aussi systématiquement les bonzes, nonnes et fidèles depuis que l’EBUV a annoncé sa décision d’organiser les cérémonies du Vesak à la Pagode Quoc An, à Hue, le 31 mai 2007. A cet effet, un impressionnant comité d’organisation avait été mis en place avec 61 hauts dignitaires, nonnes, membres du Mouvement Bouddhiste de la Jeunesse et laïcs. La Sécurité a ainsi soumis le Vénérable Thich Dieu Tanh, Bonze Supérieur de la Pagode Quoc An, à des harcèlements continuels et menacé les Bouddhistes des environs à de « sérieuses représailles » s’ils assistaient aux cérémonies. La Police religieuse a interdit aux bonzes d’utiliser le nom « EBUV », de lire le Message du Vesak 2551 du Patriarche Thich Huyen Quang (voir le communiqué du 11 mai 2007) ou de déployer des bannières ou des pancartes de l’EBUV. Le 23 mai, le Chef du secrétariat du Comité populaire de Thua Thien Hue, Le Quang Vinh, a envoyé une lettre à Thich Thien Hanh lui ordonnant d’annuler la cérémonie du Vesak. Cette lettre déclarait que l’EBUV était une « organisation illégale », que le Comité provincial de l’EBUV de Thua Thien Hue était donc également illégal et que le titre de Thich Thien Hanh de « Directeur du Comité provincial de l’EBUV » constituait une « violation de la loi ».
Le Vénérable Thich Thien Hanh a rapporté à Vo van Ai que les Bouddhistes de l’EBUV de Hue étaient déterminés à célébrer la cérémonie du Vesak demain, et ce en dépit de l’interdiction. « Interdire le Vesak est un affront pour tous les Bouddhistes au Vietnam et dans le monde car le Vesak est reconnu par les Nations Unies comme une fête religieuse internationale », a-t-il dit. « L’EBUV n’a rien fait d’illégal, nous ne demandons que notre droit à la liberté religieuse qui est garanti par la Constitution vietnamienne et la Déclaration des Droits de l’Homme de l’ONU que le Vietnam a signé ». « Si l’Etat pense que nous sommes illégaux, il doit nous entendre devant un tribunal équitable et impartial ».
Thich Thien Hanh a dit que durant les deux dernières années, l’EBUV avait organisé des cérémonies du Vesak à la Pagode Quoc An sans aucune ingérence du gouvernement. « A cette époque, le Vietnam se trouvait sur la liste américaine des « Pays Particulièrement Préoccupants » [en matière de liberté religieuse, liste CPC] », a-t-il noté, « aussi ils nous ont laissé tenir la cérémonie pour prouver qu’il y avait de la liberté religieuse au Vietnam. Maintenant que le Vietnam n’est plus sur la liste CPC et a réussi à entrer dans l’OMC, il réprime brutalement les communautés religieuses comme les Bouddhistes, les Hoa Hao et les Protestants, et emprisonne les militants démocrates. C’est un crime historique contre le peuple du Vietnam ».
Le 26 mai 2007, Thich Thien Hanh avait envoyé une lettre à Le Quang Vinh lui demandant de retirer l’interdiction et réaffirmant l’intention de l’EBUV d’organiser la cérémonie du Vesak comme prévu. « Si les autorités tentent de nous en empêcher par la force, nous nous opposerons à elles par la résistance non-violente », a-t-il annoncé à Vo Van Ai. Les Bouddhistes de Hue sont connus pour leur indépendance et leur résistance face au contrôle du Parti Communiste. En mai 1993, plus de 40.000 Bouddhistes de Hue avaient manifesté pour la liberté religieuse dans la plus grande manifestation de protestation publique ayant eu lieu dans le Vietnam communiste.
– Le Vénérable Thich Tam Lien, Directeur du Comité provincial de l’EBUV de la province de Binh Dinh, a été continuellement menacé par la Sécurité, ainsi que sa mère âgée de 100 ans. Il lui a été interdit de célébrer le Vesak. La semaine dernière, lorsque la Police lui ordonné de voter pour les élections législatives, Thich Thien Khanh a refusé, arguant : « Pourquoi devrais-je voter pour des gens qui répriment leurs citoyens et persécutent les religions ? »
– Le Vénérable Thich Thien Khanh, Directeur du Comité provincial de l’EBUV de la province de Phu Yen, a été menacé d’expulsion de sa pagode s’il ne reniait pas l’EBUV.
– Le Vénérable Thich Trung The, Directeur du Comité provincial de l’EBUV de la province de Ba Ria-Vung Tau, est surveillé toute la journée par la police et ne peut visiter les Bouddhistes que secrètement la nuit. La police a averti les fidèles bouddhistes que l’EBUV était une « organisation illégale » et que quiconque entrerait en contact avec des bonzes de l’EBUV serait « puni en vertu de la loi ».
– Dans la province de Tien Giang, les cadres de la Sécurité et de l’Eglise Bouddhiste d’Etat, l’Eglise Bouddhique du Vietnam (EBV), ont recouru aux menaces et à la force pour obliger les fidèles bouddhistes à signer des lettres dénonçant le Vénérable Thich Minh Nguyet, Directeur du Comité provincial local de l’EBUV, comme ayant des « activités s’opposant à l’Etat ».
– Dans la province de Lam Dong, le Vénérable Thich Nhu Tan, Directeur du Comité provincial local de l’EBUV, est menacé d’expulsion de sa pagode s’il persiste à organiser la célébration du Vesak.
l Les autorités vietnamiennes ont interdit la circulation du Message du Vesak 2551 délivré par le Patriarche de l’EBUV Thich Huyen Quang. Alors que le Vietnam prétend respecter la liberté religieuse, le Patriarche Thich Huyen Quang déclare dans son message que « l’EBUV subit une des pires répressions de ces 20 dernières années. On m’interdit de voyager pour être soigné. Le Très Vénérable Thich Quang Do et moi sommes maintenus en isolement sous surveillance ». « Dans les provinces partout dans le pays, les membres des Comités provinciaux crés par l’EBUV sont soumis aux contraintes et réprimés ».
Dans ce message, Thich Huyen Quang pressent les Bouddhistes de s’engager activement pour la démocratie au Vietnam, les appelant à réaliser l’esprit de justice sociale inhérent au Bouddhisme vietnamien. Cet esprit a inspiré une tradition d’engagement de 2000 ans et a permis au Vietnam de gagner son indépendance et de préserver son identité culturelle malgré les décennies d’occupation étrangère. « Le succès ou l’échec n’est pas important. Ce qui compte, c’est le cœur de diamant et la volonté inébranlable des Bouddhistes. Aussi longtemps que cette volonté existera, le Bouddhisme durera. Aussi longtemps que le Bouddhisme existera, notre peuple survivra, prospèrera et se développera en paix, et l’humanité s’embarquera dans une nouvelle ère d’amitié et d’égalité globales ».
Le Patriarche Thich Huyen Quang souligne également la nécessité de préserver « l’intégrité spirituelle ». Alors que le régime de Hanoi a fait d’importantes concessions territoriales et maritimes à la Chine, Thich Huyen Quang affirme : « L’intégrité spirituelle n’est pas différente de l’intégrité territoriale. Si nous prenons le territoire que nos ancêtres ont construit avec tant de peine et que nous l’abandonnons à des puissances étrangères, que restera-t-il de la nation et de la patrie de notre peuple ? De la même façon, l’esprit humain ne doit pas se recroqueviller ou capituler devant des forces illégitimes et immorales. C’est seulement ainsi que nous pourrons apporter les enseignements du Bouddha au troisième millénaire afin de forger la voie de la Paix et faire face aux nouveaux défis du terrorisme global et de la violence ».
Se réjouissant de la reconnaissance par les Nations Unies de l’Anniversaire du Bouddha comme une fête religieuse internationale, le Patriarche Thich Huyen Quang regrette toutefois qu’« alors que la lumière du Bouddhisme brille plus que jamais en Occident », au Vietnam, « les vertus spirituelles sont graduellement détruites ». « D’imposants monastères ont été construits, de coûteuses cérémonies organisées, mais tout ceci ne peut cacher le fait que les croyances des fidèles ne sont pas respectées au Vietnam ».