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À l’occasion de la célébration de son centenaire à Paris, la FIDH condamne les graves violations des droits de l’Homme au Vietnam

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Cérémonie d’ouverture du Centenaire de la FIDH à l’Hôtel de Ville de Paris, le 23 octobre 2022 (Photo Baptiste Cottereau / FIDH)

PARIS, 7 novembre 2022 (VCHR) – Les ligues membres de la FIDH, venues du monde entier et réunies à Paris pour leur Congrès, ont condamné la répression de la société civile et des défenseurs des droits humains au Vietnam dans une résolution votée à l’unanimité (voir le texte intégral de la résolution plus bas).

Ce 41e Congrès revêtait une importance particulière car la FIDH y célèbre son centenaire. À cette occasion, plus de 450 défenseurs des droits humains d’Europe, d’Afrique, d’Asie, des Amériques et du Moyen-Orient ont fêté l’ouverture du Congrès à l’Hôtel de Ville de Paris et ont reçu des messages vidéos du Président de la République française Emmanuel Macron, du Secrétaire général de l’ONU António Guterres et de la Maire de Paris Anne Hidalgo. Dix-sept sièges ont été laissés vides en l’honneur d’autant de défenseurs des droits humains de la FIDH en détention, dont Ales Bialiatski qui vient de recevoir le Prix Nobel de la Paix 2022.

Message vidéo du Président de la République française Emmanuel Macron à la cérémonie du Centenaire de la FIDH (23 octobre 2022)
Message vidéo du Président de la République française Emmanuel Macron à la cérémonie du Centenaire de la FIDH (23 octobre 2022)

Alice Mogwe, célèbre militante botswanaise et présidente de la FIDH, qui a été réélue lors du Congrès, a expliqué que peu après la Première guerre mondiale, « le 28 mai 1922, à l’initiative des ligues française et allemande des droits de l’Homme, des organisations des droits humains de dix pays européens se sont réunies à Paris pour fonder un mouvement pour promouvoir la paix au travers des droits humains et de la coopération entre les nations, pour s’assurer que plus jamais de telles horreurs [celles de la Première guerre mondiale, NDLR] ne surviennent. Aujourd’hui, la FIDH a grandi pour devenir une fédération internationale de 192 ligues dans 117 pays autour du globe, avec de nombreuses ligues en Asie, dont le Vietnam. »

L’annonce du Prix Nobel de la Paix décerné, cette année, à des personnalité et membres de la FIDH (le Biélorusse Ales Bialiatski, ancien vice-président de la FIDH, les ONG russe Memorial et ukrainienne Center for Civil Liberties), a été vécue comme une consécration de l’action de la FIDH.

Alice Mogwe, Présidente de la FIDH (Photo Baptiste Cottereau / FIDH)
Alice Mogwe, Présidente de la FIDH (Photo Baptiste Cottereau / FIDH)

« Le Prix Nobel de la Paix de cette année est une merveilleuse reconnaissance de ce combat. C’est le prix de la résistance. Résistance contre le totalitarisme et contre toutes les tentatives d’étouffer les voix de tous ceux qui osent se lever pour dénoncer les violations des droits humains du passé et du présent. C’est un prix pour les héros de tous les jours, un prix pour ceux qui luttent pour les droits humains, parfois à leurs risques et périls. C’est un formidable hommage au courage, à la détermination et au rôle fondamentalement positif que jouent les défenseurs des droits humains dans les situations de répression ou de conflit… parce qu’ils sont le facteur du changement vers la paix et la justice », a expliqué Alice Mogwe.

La FIDH est la toute première organisation non-gouvernementale internationale dédiée à la défense des droits de l’Homme et a grandement contribué à la promotion des droits humains dans le monde. L’un de ses illustres membres n’est autre que René Cassin, l’un des pères de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (1948). Elle est l’une des initiatrices de la Cour Pénale Internationale qui a finalement vu le jour en 2002. Son action au Vietnam remonte aux années 1920 lorsqu’elle était intervenue avec succès en faveur des patriotes vietnamiens Phan Bội Châu et Phan Chu Trinh. En 1989, la FIDH accueillait en son sein le Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme (VCHR), dont le Président Võ Văn Ái sera élu vice-président de la FIDH de 1989 à 2007. La FIDH et le VCHR ont continuellement soulevé la question de la répression au Vietnam auprès des instances internationales, comme l’ONU, ou encore le Parlement européen, et soutenu les défenseurs des droits humains sur le terrain. La FIDH et ses ligues ont dénoncé les violations des droits humains au Vietnam à chacun des Congrès de la FIDH.

Ouverture du Congrès interne de la FIDH (25 octobre 2022), de gauche à droite : Éléonore Morel, Directrice générale de la FIDH, Juliane Falloux, Directrice générale adjointe de la FIDH, Maryse Artiguelong, Vice-Présidente de la LDH, Alice Mogwe, Présidente de la FIDH, Võ Trần Nhật, Secrétaire Exécutif du VCHR (Photo Baptiste Cottereau / FIDH)
Ouverture du Congrès interne de la FIDH (25 octobre 2022), de gauche à droite : Éléonore Morel, Directrice générale de la FIDH, Juliane Falloux, Directrice générale adjointe de la FIDH, Maryse Artiguelong, Vice-Présidente de la LDH, Alice Mogwe, Présidente de la FIDH, Võ Trần Nhật, Secrétaire Exécutif du VCHR (Photo Baptiste Cottereau / FIDH)

Lors de ce 41e Congrès à Paris qui s’est tenu du 23 au 27 octobre 2022, les ligues de la FIDH ont unanimement adopté une résolution sur le Vietnam dénonçant l’utilisation des lois pour bafouer les droits fondamentaux et légaliser le plus grand arbitraire, la répression de l’expression libre et de la société civile en générale sous des prétextes fallacieux. Elles ont à cet égard soulevé le cas des défenseurs de l’environnement Mai Phan Lợi, Bạch Hùng Dương, Đặng Đình Bách et Nguỵ Thi Khanh condamnés pour « évasion fiscale » et du dissident Phạm Chí Dũng condamné à 15 ans de prison pour avoir appelé le Parlement européen à retarder la ratification de l’Accord de libre-échange UE-Vietnam (EVFTA), le temps que la situation des droits humains s’améliore au Vietnam.

Les ligues de la FIDH sont en outre très préoccupées par les exécutions dont le nombre a doublé depuis dix ans et qui peuvent se faire dans des conditions inhumaines.

Texte intégral de la résolution :

Résolution sur la situation des droits humains au Vietnam 2022

adoptée au 41e Congrès de la FIDH (23-27 octobre 2022)

La FIDH et toutes ses ligues, réunies en son 41e congrès à Paris, France,

– Considérant que durant les trois dernières années, au moins 95 militants, dissidents et défenseurs des droits humains, dont 17 femmes, ont été arrêtés, et 113, dont 17 femmes, ont été condamnés à des peines allant jusqu’à 15 ans d’emprisonnement ;

– Considérant que le Vietnam maintient et adopte des lois et règlements incompatibles avec ses obligations en vertu de la Charte internationale des droits de l’Homme (articles du Code pénal sur les atteintes à la « sécurité nationale », loi sur la presse, loi sur la croyance et la religion, loi sur la cybersécurité, dispositions contre les prétendues « fake news » sur les réseaux sociaux…) et justifie ses exactions et violations des droits humains par leur « conformité avec la loi » ;

– Notant que la « loi » à laquelle ne cessent de se référer les autorités vietnamiennes reste un concept extrêmement large, pouvant inclure de simples décisions ou résolution du Parti Communiste du Vietnam (PCV) au pouvoir, et que les lois elles-mêmes sont si vagues et imprécises qu’elles permettent d’appréhender tous les comportements des plus répréhensibles aux plus légitimes ;

– Considérant que la réglementation vietnamienne réduit l’espace de liberté des ONG opérant au Vietnam, tant vietnamiennes qu’internationales, par le biais des conditions d’enregistrement et de financement, et visent à restreindre et contrôler le rôle de la société civile, notamment dans le domaine des droits humains et de l’environnement ;

– Alarmés par les récentes arrestations et condamnations arbitraires à des peines de 2 à 5 ans de prison des défenseurs de l’environnement Mai Phan Lợi, Bạch Hùng Dương, Đặng Đình Bách et Nguỵ Thi Khanh au prétexte d’« évasion fiscale », alors qu’ils n’avaient fait que critiquer la politique énergétique du gouvernement en faveur du charbon ;

– Considérant qu’une réforme du décret 72/2013/ND-CP sur l’utilisation et la gestion de l’internet est en cours pour aggraver les atteintes à la liberté d’expression et de presse sur internet, avec notamment l’obligation pour les opérateurs de retirer tout « contenu illégal » dans les 24 heures ;

– Considérant que le nombre d’exécutions au Vietnam est le plus élevé de toute l’Asie du Sud-Est et qu’il ne cesse d’augmenter, avec un doublement en une décennie, et que le Vietnam se classe parmi les pays qui condamnent et exécutent le plus au monde ; que les centres de détention pour condamnés à mort sont surpeuplés et que l’attente dans le couloir de la mort reste « extrêmement longue » de l’aveu même des autorités vietnamiennes ; que les peines de mort sont prononcées par des tribunaux où ne sont pas garantis les droits de la défense ;

– Considérant que nombre de crimes passibles de la peine capitale sont des crimes politiques définis en termes vagues et arbitraires qui peuvent appréhender l’exercice légitime et pacifique des libertés fondamentales, à l’instar de l’article 109 du Code pénal qui incrimine la simple intention de critiquer le gouvernement ;

– Considérant qu’existe un risque de traitement inhumain lors des exécutions, qui se font par injections létales avec des produits non-précisés, puisque le Vietnam a dû prendre un décret imposant la suspension de l’exécution si le condamné ne décède pas au bout de 30 minutes avec l’emploi de trois doses létales ;

Dénoncent la répression systématique de toute voix dissidente ou discordante, et de manière générale de l’ensemble de la société civile vietnamienne, avec ses suites quasi ininterrompues de harcèlements, arrestations et condamnations arbitraires à des peines parfois très lourdes contre les défenseurs des droits humains, blogueurs, journalistes et autres activistes (comme les 15 ans de prison pour le dissident Phạm Chí Dũng), de dispersions brutales des manifestations, de censure sur l’internet, etc. ;

Sont particulièrement préoccupés par les condamnations des militants de l’environnement pour une « évasion fiscale » qui n’est manifestement qu’un prétexte, et rappellent que leurs activités constituent un exercice légitime du droit de participer à la vie publique et servent l’intérêt général ;

Condamnent l’utilisation par les autorités vietnamiennes de la « loi » pour justifier leurs pratiques bafouant les droits les plus fondamentaux et légaliser l’arbitraire aux dépens des citoyens et de la société civile vietnamienne ;

Exigent à cet égard que les lois et règlements vietnamiens soient mis immédiatement en conformité avec les obligations internationales du Vietnam en matière de droits humains et invitent les autorités vietnamiennes à collaborer de bonne foi avec l’ONU et la communauté internationale à cette fin ; le projet liberticide d’amendement du décret 72 sur l’utilisation de l’internet doit être abandonné de suite ;

Condamnent les restrictions inadmissibles et dangereuses auxquelles sont soumises les ONG, tant locales qu’internationales, au Vietnam, en particulier pour ce qui concerne leur financement et leur liberté d’action ;

Demandent un moratoire sur la peine de mort, en vue de son abolition, la réduction du nombre des crimes passibles de la peine capitale, en particulier les crimes politiques, et, dans un souci de transparence, la publication de toutes les informations utiles concernant la peine de mort au Vietnam (statistiques sur les condamnations, les exécutions et les détenus dans le couloir de la mort, produits employés pour les injections létales, etc.).

Demandent à l’Union européenne, qui est liée au Vietnam par l’accord de libre-échange EVFTA (2020), d’utiliser tous les moyens à sa disposition pour presser le Vietnam de respecter ses engagements sur le commerce et le développement équitable, en particulier dans le domaine des droits des travailleurs et de l’environnement.

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